Dans le monde merveilleux de Oui Oui Sarkozy

Nicolas Sarkozy
Ce matin, j'ai encore dérogé à mon rituel quotidien pour écouter RTL et Nicolas Sarkozy qui parle, qui parle, qui parle... mais qui ne dit pas grand chose finalement.
Après une sĂ©quence culture touchante dans laquelle il fĂ©licite Jean Dujardin pour son oscar pour The Artist, l’interview dĂ©marre… D’abord en mode diesel il faut l’avouer.

C’est le « chapitre Ă©ducatif » qui m’a particulièrement plu aujourd’hui. Optimisme, dĂ©magogie, histoire : rien ne manquait Ă  l’appel.

Une rĂ©cente enquĂŞte rĂ©vèle que Nicolas Sarkozy est très impopulaire chez les enseignants. Pense-t-il qu’il a « ratĂ© les profs » ?
« NON ». Non Nicolas Sarkozy n’a pas ratĂ© les profs. Non il n’a pas supprimĂ© plusieurs milliers de postes. Non il n’a pas rĂ©formĂ© le lycĂ©e. Non il n’envisage pas de supprimer les RASED. Non il n’a pas mis en place la LRU.

Et non, non et non, les profs n’ont jamais manifestĂ© leur mĂ©contentement en 5 ans.
Et celui-lĂ  mĂŞme qui passe son temps Ă  tartiner de pommade les « Français dans leur ensemble » accuse de dĂ©magogie celui qui veut crĂ©er 60 000 postes de plus dans l’Éducation Nationale. Après un calcul d’apothicaire, il dĂ©clare qu’« il y a un peu plus de 400.000 Ă©lèves de moins dans l'Éducation Nationale depuis 10 ans, et il y a 45.000 profs de plus ». Depuis ce matin, il a clairement Ă©tĂ© prouvĂ© que ces chiffres Ă©taient faux. L’apothicaire est fatiguĂ©, excusez-le.
« S'il suffisait d'embaucher des profs pour que l'École fonctionne et que les profs soient heureux, on devrait avoir l'École qui fonctionne le mieux au monde et les professeurs les plus heureux du monde ».

Au dĂ©but, j’ai cru que j’avais mal compris. Replay. Ah non c’est bien ce qu’il a dit.
Mais comment peut-il affirmer un truc pareil alors qu’il n’a eu de cesse pendant 5 ans de supprimer des postes Ă  tour de bras ? S’il les avait augmentĂ©s ce serait-ce que de quelques milliers et que cela avait Ă©tĂ© un Ă©chec, alors oui il pourrait affirmer ce genre de choses.

Et parler Ă  la place des profs, penser pour eux, savoir ce qui est bon pour eux. Mais c’est loin d’ĂŞtre le cas.

Du coup, on aimerait bien en savoir un peu plus sur la « prĂ©sence des adultes » qu’il veut augmenter dans les Ă©tablissements. Bon et bien on repassera : ce n’est pas le moment. Monsieur Sarkozy aura une autre « occasion d’en parler et de faire des propositions fortes ». 

Ah ben d’accord, mais quand ça ? On peut savoir ? Parce que c’est bientĂ´t l’Ă©lection non ?

Mais puisque les journalistes insistent, alors soit ! Il nous donne une rĂ©ponse.
Approximative la rĂ©ponse hein. 
Pleine de clichĂ©s aussi. 

En VRP des Ă©tudes dirigĂ©es et des bouĂ©es scolaires, il se pose en dĂ©fenseur des enfants qui se « noient » Ă  l’Ă©cole. Attention « baignade interdite ». 

Et alors après la noyade, la traversĂ©e du dĂ©sert. 
On lui demande de nous prĂ©ciser quel sera le rĂ´le de ces « nouveaux adultes ». La rĂ©ponse me laisse sans voix puisqu’elle ne veut rien dire : « VoilĂ  ce que je pense. Je pense qu'il faut revaloriser d'urgence la fonction enseignante, d'urgence ». AllĂ´ ?

Comme remède Ă  la paupĂ©risation des enseignants, il propose… ah non pardon, il ne propose rien.

Mais il rĂ©pond par une question : « quand l'enseignant rentre dans sa classe, combien y a t'il d'enfants qui se disent, moi demain je vais faire le mĂ©tier du professeur ? Combien ? »… Ah ben ça, on ne sait pas… Peut-ĂŞtre la moitiĂ© ? Disons entre 15 et 20 au bas mot puisque les classes sont surchargĂ©es non ?
Non. Selon lui, très peu d’Ă©lèves pensent cela. Et pour y remĂ©dier, une seule solution : « Je ferais des propositions sur ce sujet, sur la base du volontariat. Il faut plus d'adultes dans l'École, il faut mieux rĂ©munĂ©rer les adultes auprès de nos enfants ». 
Évidemment ! Que n’y avons-nous pas pensĂ© plus tĂ´t ?

Ces feignasses de profs qui ne font que 26 heures dans le primaire et 18 heures « d'obligation de service comme on l'appelle pour le secondaire », pourquoi ne feraient-ils pas en plus un peu de volontariat ? 

Et pendant ce temps-lĂ , on pourrait embaucher des vacataires prĂ©caires pour prĂ©parer les cours, organiser les activitĂ©s d’Ă©veil et de psychomotricitĂ©, corriger les copies de bac… Mais combien ça va coĂ»ter alors ?
« Ce qui est quand mĂŞme extravagant : il n'y pas un professeur qui a un bureau dans l'Ă©tablissement. Si dans sa classe, il y a un enfant qui a un problème, oĂą est ce qu'il discute tous les deux, dans la cour, devant les autres, comment ça fonctionne ? Est-ce qu'on a pensĂ© Ă  cela? »
Ah d’accord ! Un bureau pour les profs pour qu’ils puissent en plus d’enseigner, faire l’assistante sociale, le psychologue, l’auxiliaire de vie et pourquoi pas un peu enseignant-e RASED dans la foulĂ©e. 
Tout ça pour que les enfants arrĂŞtent de se « noyer » « dans une classe oĂą ils sont 25 ou 30 »… 

Dans le monde merveilleux de Oui-Oui Sarkozy, les enfants ne sont que 20 ou 30 par classe. Elle est pas belle la vie ?

Mais est-ce qu’il va rĂ©pondre Ă  la question ? Combien-ça-va-coĂ»ter ?
« J'aurai l'occasion de prĂ©ciser, très prĂ©cisĂ©ment si vous permettez mes propositions sur le sujet ».
Ah ben d’accord, mais quand ça ? On peut savoir ? Parce que c’est bientĂ´t l’Ă©lection non ?
Mais ce qui est sĂ»r, c’est que ces « adultes en plus » ne seront pas des fonctionnaires…

Bon et bien cette fois-ci on est fixĂ©s : des CDD, des stagiaires, des intĂ©rimaires, de la prĂ©caritĂ© en veux-tu-en-voilĂ .

Finalement, trois questions plus tard, Nicolas Sarkozy nous dĂ©voile le fond de sa pensĂ©e : il ne veut pas augmenter le nombre des adultes mais augmenter leur prĂ©sence.

Travailler plus pour gagner plus ? Ou travailler plus pour gagner autant ?

Bon et bien on ne saura pas ! « On peut en discuter […] on peut parfaitement discuter de ça ».
Ce « chapitre Ă©ducatif » se clĂ´t par un cours d’histoire Ă©mouvant sur l’Ă©volution du rĂ´le de l’instituteur depuis la IIIe RĂ©publique. Et nous seront ravi-e-s d’apprendre que « la France de l'Ă©poque, Ă©tait une France rurale et les enfants allaient Ă  la fois chez l'instituteur, dans l'Ă©cole du village, et aussi, ils allaient Ă  la catĂ©chèse que les familles soient croyantes ou pas, c'Ă©tait une toute autre Ă©poque. Aujourd'hui la France profonde, c'est la France des quartiers, c'est la France des banlieues, c'est la France des villes. Donc cette partie, lĂ , elle a Ă©tĂ© complètement occultĂ©e ».
Alors, ami-e-s de la France profonde, sachez que vos enfants ne sont que 25 ou 30 par classe et qu’ils-elles auront bientĂ´t des adultes sorti-e-s de nulle part pour les sauver de la noyade. 

Non mais de quoi se plaint-on ?

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