Ne sombrons pas dans la déchéance.

Entre les achats de Noël, la dinde, les huîtres et la bûche, nous sommes nombreux-ses à avoir réagi à l'annonce du Président de la République de vouloir déchoir de la nationalité française les binationaux nés français qui seraient reconnus coupables d'actes de terrorisme contre la France.

Ma première réaction a été plutôt fataliste. Je me suis dit qu'après tout, aux actes terroristes devait répondre une mesure exceptionnelle. Je crois aussi que, comme cette mesure avait été annoncée par François Hollande au Congrès de Versailles le 16 novembre, je n'étais pas surprise qu'elle soit maintenue. Pour faire court, je m'y attendais tellement que je n'ai absolument pas réagi.

Puis s'en sont suivis un battage médiatique et politique et des échanges musclés.

Déboussolée, je me suis demandé où était l'unanimisme du 16 novembre, où étaient les Français-e-s qui approuvaient cette mesure puisque les seul-e-s dont on relayait la parole était celles et ceux qui étaient farouchement opposé-e-s à cette mesure.

Le banquet de Noël terminé, il me reste malgré tout un arrière-goût indigeste.

Après deux Alka Seltzer et un verre d'Hepatoum, je suis convaincue que, dans le contexte actuel, inscrire une telle mesure dans la Constitution, n'apportera aucune réponse satisfaisante au terrorisme dont nous sommes les cibles sinon celle d'une division encore plus importante entre les Français, qu'ils soient nés français, étrangers ou auvergnats.

Par ailleurs, j'ai de sérieux doutes sur l'efficacité d'une telle mesure à l'encontre d'individus capables de se faire sauter n'importe où, n'importe quand. Que peut bien leur importer la déchéance de la nationalité quand ils n'ont pour seul objectif que de mettre à bas la République en massacrant ses citoyens ? Puisqu'ils n'ont plus rien à perdre, quel peut bien être l'intérêt d'inscrire une telle mesure dans la Constitution dès lors que, par la seule voie qu'ils ont choisie, ils ne sont déjà plus français depuis bien longtemps?

Et puis j'ai relu le discours de Grenoble de 2010. Le fameux discours de Nicolas Sarkozy dans lequel il annonçait sa volonté de déchoir de la nationalité française certains "français naturalisés depuis moins de dix ans condamnés pour meurtre ou tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique. [...] La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police ou d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique."

Alors oui, je sais. On en est loin, très loin même puisqu'on parle aujourd'hui de terroristes. Nous sommes très loin des délits cités par Nicolas Sarkozy. Et pourtant... La mesure évoquée est la même et je la condamnais déjà en 2010.

Mais... Autant je suis convaincue de la nécessité de prendre des mesures exceptionnelles pour condamner celles et ceux qui ont été, sont ou seront reconnus coupables d'actes de terrorisme, autant je suis convaincue que la déchéance de la nationalité n'est pas et ne sera jamais la solution.
  1.  Parce qu'elle divisera encore plus les Français-e-s selon leurs origines et quand on voit ce qui se passe depuis 4 jours en Corse, m'est avis que l'heure n'est pas à cliver encore davantage mais bien à unir et rassembler les Français, tous les Français d'où qu'ils viennent, face à la menace terroriste.
  2. Parce que, je l'ai déjà dit, au-delà de l'effet d'annonce spectaculaire d'une telle mesure, je suis persuadée que les premiers concernés s'en moquent comme de leur premier Coran d'être déchus de la nationalité française dès lors que leur seul objectif est de détruire notre République et de "mourir en martyr".
  3. Parce que, même si ce genre d'annonce peut donner une impression de fermeté et d'autorité, elle n'en garde pas moins un arrière-goût contraire aux valeurs de notre République : celui de catégoriser les Français-e-s en les exposant à des peines différentes selon qu'ils sont "de souche" (et j'emploie à dessein cette expression que je vomis) ou binationaux.
  4. Parce qu'une telle mesure n'aura pour seule vertu que celle d'être symbolique et sans aucune valeur punitive pour les coupables.
Enfin, ce dont je suis sûre, c'est que quand une certaine gauche dite bien pensante, super morale, super dans le vrai, super à gauche, vraiment de gauche, qui a raison sur tout, ose comparer Valls et Hollande à Pétain, à Laval,  en les traitant de fachos matin, midi et soir entre la dinde et les huîtres, elle est complètement à côté de la plaque, shootée au Point Godwin, et, par-dessus le marché, dans l'anachronisme le plus complet.

Du coup, si, comme moi, vous avez été désemparé, sans opinion ou perplexe après cette annonce, je vous invite à aller lire les copains... Qui ne sont pas tous-tes d'accord. C'est le principe du débat.
En ce qui me concerne, et vous l'aurez compris, c'est non.

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20 commentaires

  1. Toujours dans les "Grandes Valeurs", ça me va. Bobiyé.

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  2. Puisque vous semblez étrangement vous obstiner à massacrer votre propre langue (Français-e-s opposé-e-s), je vous supprime de ma blogroll et vous laisse avec vos Lyonnais de fond de tiroir.

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    1. Quel manque de tact, supprimer de sa blogroll. C'est petit sénior Goux.

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    2. Quel manque de tact, supprimer de sa blogroll. C'est petit sénior Goux.

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    3. De la déchéance positive ...
      "Libérer Elo'Dy ". Fait. (Gloire!)

      Signé: Chevalier de St-George, " Lyonnais du fond du terroir ".

      /...

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    4. Auxi, 29 décembre 2015

      @Didier Goux : puisque vous semblez étrangement vous obstiner à massacrer votre propre langue (blogroll), je vous laisse avec vos amis franglais de fond de tiroir.

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    5. Me voilà bannie de la blogroll de Monsieur Goux. Je pleure depuis hier.

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    6. Menteuse ! Dites plutôt que vous n'avez pas dessaoulé de trois jours…

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  3. Et ben figure-toi que j'ai expliqué à une jeune Iranienne hier,avant de la remettre au train pour Londres, que cette mesure ne servirait à rien sinon à faire plaisir à ceux que nous combattons au nom des idéaux de notre République. (Précision: la jeune Iranienne est en stage pour un an à Londres pour approfondir ses connaissances sur le droit international et sur les droits de l'homme!)
    Ravi que tu sois contre. Bises.
    Marc Lucas? 27/12/15,22h00;

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    1. J'ai expliqué à une arabe, avant de la foutre dans le train pur l'étranger que...

      Tout est dit.

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    2. Les Iraniennes ne sont pas Arabes gros !

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  4. Bonsoir Elody,

    Pour info, le projet de loi constitutionnelle portant réforme du régime de la déchéance a été déposé sur le bureau de l'assemblée nationale sous le n° 3381. Il est dispo en ligne.

    Il comporte deux articles dont le second modifie l'article 34 de la constitution en autorisant le législateur à fixer "les conditions dans lesquelles une personne née française qui détient une autre nationalité peut être déchue de la nationalité française lorsqu’elle est condamnée pour un crime constituant une atteinte grave à la vie de la Nation".

    Le raisonnement du gouvt est le suivant: il estime que l'extension de la déchéance à un binational né français est probablement anticonstitutionnel. En conséquence de quoi, il faut modifier la constitution, d'où la nécessité de cette réforme constitutionnelle, annoncée en grande pompe en novembre.

    A charge, ensuite, au législateur de légiférer pour étendre concrètement la déchéance au binationaux nés français s'il le veut. Il faudra donc une loi ordinaire après cette réforme de la constitution.

    En dépit des pb juridiques que cela pose, c'est assez bien joué et c'est typiquement hollandais: ça ressemble à du foutage de gueule, mais c'est techniquement suffisamment bien ficelé pour faire sérieux.

    Lis l'exposé des motifs, ça vaut le coup: le gouvt reconnait quasiment noir sur blanc qu'il se prépare à faire qque ch d'anticonstitutionnel et qu'il faut, pour que cela soit juridiquement possible, écarter un principe fondamental reconnu par les lois de la république en modifiant la constitution.

    Moralité: quand les règles du jeu te plaisent pas, change-les. Te fais pas chier.

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  5. Cette déchéance de nationalité est totalement stupide sur le plan du droit international et des relations diplomatiques. Un franco-tunisien n’ayant vécu qu’en France sera expédié en Tunisie pour déchéance de nationalité, donc la Tunisie deviendra la benne à ordures pour délinquants made in France déchus. La réponse du berger à la bergère sera que les autres pays déchoient aussi préventivement illico presto tous leurs bi-nationaux franco-machin pour pas encombrer leurs prisons avec des éventuels délinquants franco déchus.

    Hollande est d'une bêtise et incompétence rare, nul en économie, nul en droit, pauvre France.

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  6. Moi, il y a une chose qui me chiffonne : la gauche était montée au créneau en 2010 contre les projets de déchéance de nationalité de Sarkozy, qui visaient alors les naturalisés. Depuis, apparemment, il n'y a pas eu de suite... Où étaient depuis 2012 ceux et celles de nos élu(e)s qui se manifestent aujourd'hui pour défendre les né(e)s français(es) ?

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  7. Notre fédération, particulièrement concernée car composée de beaucoup de binationaux, a entrepris de rassembler les gens opposés à cette mesure via la pétition suivante, qui monte doucement mais sûrement ! https://secure.avaaz.org/fr/petition/Au_president_de_la_Republique_Francois_Hollane_Le_retrait_de_la_mesure_de_decheance_de_nationalite_pour_les_bina/?wBLdbkb

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    1. Ah oui, quand même : deux mille signatures ! On sent la vague de fond, là…

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  8. Pour lutter contre le chômage on pourrait déchoir les chômeurs de leur nationalité . Le chômage serait alors complètement éliminé de la France .

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